Nous vivons avec des certitudes mises dans nos “lois” économiques. Or nous sommes confrontés au défi de résoudre des crises : financières, sociales, écologiques et une crise de sens. Nous pensons tout maîtriser, mais les dérèglements et déséquilibres de nos sociétés mondialisées, vivant dans la démesure et la course folle, obligent l’homme à redécouvrir sa vulnérabilité. Notre système va dans une impasse.
Est-il possible de ralentir ? Y a-t-il un projet de société qui ne soit ni dans le “toujours plus” ni dans la décroissance radicale et permette de vivre à un autre rythme ?
Jean-Baptiste de Foucauld, inspecteur des finances, fondateur de “solidarités nouvelles” et de “démocratie et spiritualité”, ancien commissaire au Plan, s’attaque à ces questions dans son livre “l’abondance frugale” qui voudrait inspirer un nouveau Pacte civique de solidarité pour sortir de nos ornières. Plus de sobriété pour plus de justice et plus de créativité pour plus de sens. Pris dans les filets de la consommation et tellement habitués à voir nos désirs satisfaits, sommes-nous prêts à accepter de nous limiter et d’avoir pour appui sobriété, justice et créativité ?
Parmi les nombreux points abordés dans les huit chapitres, l’auteur insiste sur le rapport au temps et l’importance des traditions spirituelles. L’énergie spirituelle, notamment celle qui vient de l’Évangile, et les énergies économiques et politiques doivent être prises en compte.
La société va trop vite, toujours plus vite. L’économie a hypertrophié le temps productif au détriment du temps relationnel et du temps spirituel qui sont pourtant nécessaires aux besoins fondamentaux de l’être humain : rencontres, amitié, famille, intériorité, réflexion gratuite, etc ; autant de lieux qui nous permettent de donner sens à la vie.
S’interroger sur nos vrais désirs et passer d’un temps subi à un temps choisi rend possible de construire son intériorité et de développer ses capacités à résister au monde ambiant. Le rapport temps production – revenu est à repenser ; le retour au plein emploi à favoriser. Des pistes sont lancées.
L’auteur est lucide sur les obstacles à franchir au plan individuel comme aux plans collectif et politique. De tels choix demandent d’organiser sa vie en conséquence et d’engager une grande négociation sociale ; ce n’est pas une mince affaire. Cela suppose beaucoup d’écoute et un bon fonctionnement de nos démocraties.
Jean-Baptiste de Foucauld apporte une contribution et des propositions qui rejoindront tous ceux qui cherchent à civiliser le capitalisme, à mettre l’économie au service de l’humanité et non l’inverse, et à revenir à l’essentiel pour laisser aux générations futures une belle qualité de vie.
Frère Jean-Louis LEJAY, Prieuré St-Etienne, Châteaumeillant (Cher)
Publié dans Chronique n°252 de Septembre 2010
L’abondance frugale, éd.Odile Jacob, Paris, 2010, 276 p., 23 euros
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